En ce début de Printemps, alors que la Neige avait complètement fondue, laissant reluire sur les paysages de l'Hastanie d'étincelantes lumières, une petite ombre marchait avec courage. C'était un petit garçon, frêle et fragile. Sa longue chevelure était faite de blondeur, comme l'épi des blés, et sa peau n'était pas colorée de joie et de vie comme les autres enfants de son âge. Il tenait dans sa main crispée une lettre. Ses haillons dévoilaient par endroit son corps marqué par un long périple. Et c'est le visage implorant, marqué par les morsures impitoyables du soleil, crachant presque ses poumons dans une violente toux qu'il ouvrit la porte de la Taverne, avant de s'effondrer.
Luc et Marguerite, aidés par d'autres clients, vinrent immédiatement porter de l'aide à l'enfant. L'isolant dans une chambre inoccupée, ils lui apportèrent de l'eau fraîche, et de la nourriture. Un médecin devait être en route, quelqu'un était allé prévenir le Centre de Soin. Luc tentait habilement de défaire l'emprise des doigts du garçonnet sur la lettre. Enfin, quand il y arriva, il put voir qu'elle était adressée à Séphora et Gabriel d'Argon. Inquiet, le tenancier déplia la missive et la lut avant de blêmir. Par mesure de précaution, il alla vérifier à la porte de la Taverne, mais elle ne l'accompagnait pas. Il était seul.
Et quand Marc-Antoine ouvrit ses yeux, ils étaient rougis et cernés de douleur. En parcourant Citria, il n'avait jamais vu autant de lumière et ses rétines, habituées à une obscurité crasse, avaient hurlé de douleur. Ses belles prunelles d'un bleu nuit, conservaient encore leur belle couleur.
Luc conserva la lettre, peut-être dans l'espoir de la donner aux destinataires. Mais, alors qu'il était occupé à nettoyer le planche de l'étage, un client se glissa discrètement derrière le comptoir et attrapa la lettre froissée avant de disparaître.