Tourments

Sujet: Re: Tourments Mer 27 Aoû 2008, 10:23 am

Parfois dans les jardins de Citria, une voix se faisait entendre, lasse. Elle s'adressait au Père Sacré. Lui posant milles et unes questions sur un ton désespéré. Puis la voix se taisait et le reflet malingre dans la fontaine s'effaçait. Peut être se croiseraient t-elles un jour.

Sujet: Re: Tourments Jeu 28 Aoû 2008, 11:19 am

Adossé à une roulotte près du passage magique reliant Citria à Hildrim, Romain tentait de trouver un peu de calme. Les yeux fermés, il profitait du silence de la nuit, du calme et de la paix qu'on lui laissait enfin. A cause de son apparence, de ses origines, il devait s'expliquer à chaque croisement de chemin. Tous voulaient savoir pourquoi un Kheijan était présent à Hildrim, s'habillait et s'exprimait tel un Hastane ayant trop longtemps été séparé de son peuple.

Il suscitait parfois le dégout, éveillait la méfiance, réveillait de vielles rancunes dissimulées au fond de chaque être. Mais peu à peu, il commençait à être reconnu, bien qu'on le laissait souvent sur le coté. Il y avait bien demoiselle Vitalie, qui avait pris soin de lui, de le vêtir, de le nourrir et de lui fournir un logement. Mais depuis la retraite en Hildrim, il s'était à nouveau retrouvé seul, tel un intrus toléré mais peu apprécié.

Il était donc là, assoupi, seul, quand Sibylle s'approcha lentement de lui. Il se réveilla en sursaut, réflexe profondément ancré de ce qu'il avait subit dans le désert. Sibylle se dressait devant lui, son regard dirigé droit devant elle. Malgré la noirceur de la nuit, il se rendit rapidement compte de son infirmité, et surtout de son attitude tellement différente de celles que Romain rencontrait généralement. Malgré son jeune âge, elle semblait, elle aussi, avoir des blessures profondes.

Sujet: Re: Tourments Jeu 28 Aoû 2008, 3:38 pm

Assis dans l'herbe fraiche, profitant du calme de la nuit, ils firent lentement connaissance. Bizarrement, Romain se détendit rapidement, comme si conter son histoire à l'aveugle pouvait lui rendre momentanément la vue. Il était rassuré de savoir qu'il n'était pour une fois pas jugé d'avance sur son physique. Certes, une aura Kheijanne émanait de lui, telle une odeur de sable chaud qui jamais ne pourrait s'en aller, mais Sibylle était curieuse de connaître ses origines.

C'était bon de trouver un peu de compagnie. Une personne affectée par la guerre, mais qui ne pouvait que s'y plier et la laisser passer. Il ne sentait plus seul dans la foule, agressé par les regards suspicieux à son égard.

Son histoire terminée, un silence les couvrit tout les deux. Lui, l'observant attentivement, détaillant ses traits, tentant d'imaginer un sourire sur ce visage triste. Qui était-elle? Elle voyait sans ses yeux, parlait en silence, écoutait avec son corps. Il était clair qu'elle n'était pas comme les autres. Romain était à la fois rassuré et inquiet par sa présence.

Cependant, il ne voulait pas que cela se termine ainsi. Il voulait prolonger ce moment de détente, sentiment qu'il n'avait presque jamais connu dans sa vie. Seule l'unique compagnie de sa mère dans leur tente au campement, lors des expéditions de pillage et de brigandage, avait pu apaiser son esprit comme maintenant. Il ne pouvait pas se résigner à la voir partir, se retrouver à nouveau seul et submergé par l'angoisse du lendemain inconnu.

Une idée lui traversa rapidement l'esprit. Un bain ne pouvait lui faire de mal, et éveillerait surement les sens de l'aveugle tout en la détendant. Son aspect n'était guère flamboyant pour une Hastane, ses vêtements étaient sale et en piteux état. Il le lui proposa donc, espérant n'avoir qu'une seule réponse.

Paysan Nbre de messages : 112 Inscription : 18/12/2007

La question destabilisa complètement la jeune aveugle. Un bain? avec lui? un inconnu? un homme?...Elle sonda rapidement son interlocuteur et n'y trouva aucune idée malsaine. Elle accepta donc l'invitation en se disant qu'effectivement...elle devait bien se laver un jour où l'autre. Ils se rendîrent donc aux bains d'Hildrim.

L'eau était tiède et agréable. Cela faisait longtemps que Sibylle n'avait pas prit le temps de détremper un peu dans de l'eau propre. Son nouvel aspellor faisait de même, naviguant ici et là dans l'immense bassin. Ils reprirent leur discution, entrant dans des sujets plus épineux.. passant par les valeurs de Romain jusqu'aux causes de l'handicape de Sibylle.
Elle commençait à connaître d'avantage de cet être immigré vers Citria, se demandant ce que le peuple attendait pour faire de lui, un hastane fier. Certe il aurait besoin de quelques cours des préceptes hastanes, de la part du clergé mais elle voyait en lui la détermination qu'il lui fallait pour traverser cette dure épreuve.
La naîveté de cet homme l'a faisait sourire. Il était d'une fraicheur et d'une spontanéîté qu'elle appréciait beaucoup. Il était rare qu'elle s'entendait bien avec les gens.. mais peut-être voyait-elle en lui, quelqu'un comme elle.

Romain, dans un élan d'amusement, tenta de couler Sibylle. Évidemment, c'est dans une riposte défensive que Sibylle se remit sur pied, étouffée et insultée au plus haut point. Mais là n'était pas sa faute, Romain, coupable se mit a bafouiller.
L'aveugle se sentit donc coupable d'avoir agit avec autant d'agressivité. Elle tenta de lui expliquer que la confiance était quelque chose dure à gagner..que son état l'a rendait néanmoins plus vulnérable.

Quand le bain fut terminé, Sibylle quitta son nouvel aspellor pour rejoindre un endroit tranquille où elle pu se reposer. Elle repensa à sa journée et à quel point elle avait sourit et rit... ce que rarement elle faisait.
Elle ferma les yeux et soupira de soulagement...peut-être devrait-elle d'avantage accorder sa confiance...

Sujet: Re: Tourments Dim 31 Aoû 2008, 7:14 pm

Il faisait froid en cette journée d'automne. La pluie battante sur sa cape lui pesait autant qu'un chargement de buches d'érable sur les épaules. Le vent le frigorifiait encore plus. Il n'était pas du tout habitué à ces conditions climatiques. La chaleur du désert commençait à lui manquer. Le souvenir de la brise légère rafraichissant son corps couché à même le sable chaud du désert. Le ciel clair, dénué de nuages, offrant un ballet d'étoiles ouvrant toutes les possibilités à un esprit rêveur. De temps en temps, une lumière filait dans le ciel. Un message envoyé par les Cilias?

Tout ces regrets s'évanouirent instantanément lorsqu'il aperçu les jardins du château royal de Citria. Les fleurs étaient rares dans le désert, et en voir une telle variété formant un ensemble harmonieux le laissa sans voix. Il était fasciné par toutes ces couleurs naturelles, dansant dans la brise. Il avait déjà pu pénétrer dans Citria un court moment auparavant, mais il n'avait s'entraperçut le château de loin, celui-ci lui demeurant inaccessible.

Contemplant les jardins, il ne s'était pas aperçu que Sibylle l'observait de ses sens un peu plus loin. Elle le salua, il lui rendu son salut et engagea la conversation avec sa nouvelle amie. Mais rapidement, d'autres personnes connaissant Sibylle arrivèrent, d'autres encore, et un petit attroupement se créa aux alentours des escaliers menant aux jardins. Sibylle remarqua le malaise de Romain. Il avait toujours vécu dans un petit campement d'une dizaine de personnes tout au plus. Tant de paroles, de gestes, d'informations saturaient ses sens, il se sentait perdu, dépassé.

Ils s'éloignèrent donc à deux, cherchant un peu de calme. La nuit était en train de tomber. Dormir dans une auberge d'Hildrim ne les intéressait pas. Ils profitèrent de la roulotte rudimentaire mise à la disposition des hastanes, ceux-ci préférant largement un lit douillet dans des murs solides.

Paysan Nbre de messages : 112 Inscription : 18/12/2007

15 ans s'écoulèrent.

-Oh Marie....toi qui est maintenant parti rejoindre Odéon... entend ma prière aujourd'hui. J'étais Sibylle.. une fleur éteinte et fanée par l'amour que je portais cruellement au fond de mon être. Je suis Sibylle, celle qui sourit pour faire plaisir et qui au cours des années , à apprit à vivre avec les impossibilités et les impasses de la vie. Je serai Sibylle..celle qui sera résignée et incapable d'avancer dans cette vie et dans cette ville.

Je suis la fiancée de Romain D'Organo, cet homme qui n'a pas été terrifé par mon handicape...Il a su voir en moi, autre chose qu'une aveugle perdue....une aveugle incomprise. Je lui ai donné un fils et une fille...Je lui ai donné mon coeur, mon âme.. mon corps et tout ce que je possède....Marie.. pourquoi ne suis-je pas heureuse comme tous les autres couples de ce monde....pourquoi suis-je interdite aux bonheurs, aussi quotidiens que surprenants...

Sans Romain.. que serais-je devenue...que serais-je devenue haec....cette femme triste et seule que j'étais.. serait surment morte de chagrin, dans un parc, loin des yeux indiscrêts et vicieux....Romain... mon sauveur , amant et époux....Romain...me sauveras-tu encore une fois de la tristesse qui rebondit sans cesse dans ma tête......

Il était rare de voir Sibylle dans les rues...restant pour la plupart du temps enfermée dans la petite maisonnette, à préparer le repas.. faire le ménage et attendre que le destin l'a frappe.
Elle sortait néanmoins de temps en temps.. pour sentir l'odeur urbain qui lui manquait dans sa petite maisonnette, loin.. très loin.

Sibylle avait toujours été une femme dérangée et mélancolique de nature...Jamais elle ne cherchait ailleurs ce qu'il ne lui tombait pas sous le nez. La manque d'ambition de l'ancienne sorcière l'a faisait toujours tomber plus bas.. dans les méandres de la dépression.

Aujourd'hui... Sibylle avait atteind un point critique.. un point qui l'avait mené au lit. Elle s'y était allongée pour se reposer.. mais ce repos fut plus long que prévu.. plus les heures avançaient... plus l'envi de se lever disparaissait. Elle avait fermé les yeux un moment...... qu'un petit moment...
«Qu'est-ce que Romain va penser»...disait-elle en s'endormant... «le soupé n'est même pas fini....».

Sujet: Re: Tourments Dim 19 Avr 2009, 5:55 pm

Une journée de plus fort occupée à l'économie. Il n'était pas rare de voir Romain y dormir afin de clôturer les dossiers urgent et de rattraper le retard s'accumulant peu à peu. La sombre période d'absence de la Haute-Censeur avait fait prendre un gros coup de vieux à Romain. Des cernes apparaissaient régulièrement sous ses yeux, signe flagrant d'un manque de sommeil. Heureusement, cette période s'était enfin terminée, les rangs de l'économie s'étoffant peu à peu.

Il y avait bien eu ce départ précipité pour Sombrum. Romain avait paru particulièrement nerveux en faisant son sac, n'emportant que le strict minimum, se refusant à perdre trop de temps. Il ne s'était arrêté que pour embrasser sa douce, comme si c'était la dernière fois. Partant au galop, de la tristesse pouvait se lire sur son visage.

Cependant, à son retour, il avait paru tellement plus détendu, presque serein. Il s'était même permit une journée de repos, profitant des derniers jours d'automne pour se promener avec son aimée en forêt, lieu enivrant tout les sens. Le parfum de la forêt, les danses des feuilles tombante, les cris des châtaignes se fendent sous leurs pas, le vent caressant leurs visages.

Rentrant juste avant la tombée de la nuit, il avait prit le temps de passer chez l'apiculteur chercher un pot de miel de romarin. Ce nectar des insectes rappelait les plaisirs d'été pendant un instant fugace. Rien de tel que pour se réchauffer le cœur durant les rudes journées d'hiver. Cherchant la petite clef dorée dans sa poche, Romain ouvrit cette dernière et entra dans leur petite maison...

Sujet: Re: Tourments Mer 29 Avr 2009, 1:45 pm

Quelque chose avait changé entre Sybille et Romain. Le regard de Romain semblait coupable, comme s'il regrettait un évènement récent. Seulement, il semblait plus vrai, plus sincère.

- Pourra-t-elle me refaire confiance, un jour?

Telle était la question qu'il marmonnait à longueur de journée. Parcourant les ruelles de la Sainte Cité, il n'était plus qu'à moitié présent. Une partie de lui était partie ailleurs, dans un autre monde, dans une autre vie. Sortant parfois son habituel calepin, il y griffonnait une longue liste, ne voulant plus rien oublier. Il n'y avait plus de retour possible, il lui fallait parcourir ce long chemin, sans regarder derrière lui. Une minute d'inattention, et sa fin le rattraperait immédiatement.

Puis, d'un air déterminé, il accéléra le pas.

- Quoi qu'il arrive, je la protégerai. Même si je dois y laisser ma vie...

Paysan Nbre de messages : 112 Inscription : 18/12/2007

En miette, Sibylle était assise sur le plancher froid de la maisonnette.
Les bras tombaient de chaque coté de son corps, le visage détruit et dépité, elle fixait le néant devant-elle.

La veille fut une soirée et une nuit éprouvante, elle n'avait pu trouver le sommeil dans les bras de cet homme qu'elle croyait connaître. Elle éprouvait pour lui une colère et une haine peu connue chez un couple. Elle avait même songé à l'étouffer pendant son sommeil. Mais quelque chose l'a retenait.. c'était l'amour qu'elle portait pour cet homme indigne de lui avoir volé son coeur. Elle le détestait à un point tel qu'elle l'imaginait mourir dans toute sorte de souffrance aussi terrible l'une que l'autre.

Jamais elle ne pourrait de nouveau lui faire confiance, mais elle n'avait que lui dans ce monde cruel et elle ne désirait pas se retrouver seule au milieu d'inconnus aussi individualiste que des statues de cire.

Elle ferma donc les yeux sur son passé, son présent et son avenir pour se laisser guider dans les méandres qu'elle allait devoir affronter, le corps frêle et l'esprit détruit.

Sujet: Re: Tourments Mar 05 Mai 2009, 8:35 am

Cela faisait maintenant plusieurs jours que Romain n'avait plus donné de nouvelles. De nombreuses rumeurs circulaient en ville, toutes plus insensées les unes que les autres. Seul son absence et l'énervement de la Haut-Censeur étaient des faits confirmés.

Qu'était-il arrivé de Romain? Nul ne pouvait le dire. Peu nombreux étaient ceux qui connaissaient la vérité, et leurs langues ne se délieraient probablement jamais. Mais jamais plus, le semi-Kheijan ne parcourrait les rues de Citria, un calepin en main.

Sujet: Re: Tourments Mar 12 Mai 2009, 7:38 pm

La rumeur c'était rapidement répandue dans toute la Sainte Cité. Romain d'Organo était recherché pour crimes contre la cité, crime contre sa majesté, et bien d'autres choses.

De son bureau, il avait eu la chance d'entendre arriver la patrouille de rédempteur venu fouiller ses bureaux. Attrapant un petit sac au fond d'une armoire, il eu juste le temps d'enfiler une robe et de s'arranger pour ressembler à une servante. Un léger voile bien placé, une mine baissée, et il pourrait s'en sortir.

La patrouille passée, il attendit encore quelques minutes que l'économie se calme. Puis, sortant discrètement, un plateau à la main, il tenta sa chance. Mais c'était sans compter la vigilance des rédempteurs, arrêtant presque tout les kheijans à vue afin de procéder à un contrôle d'identité.

Romain feignit avoir oublié ses papiers à la banque, espérant encore avoir une occasion de fausser compagnie à ses nouveaux amis. Hélas, la surveillance fût trop rapprochée, inquisiteur et agent du Roy étant sur le qui-vive. Son maigre déguisement ne fit pas le poids lors d'un interrogatoire plus poussé à la caserne, et ce fût le début de la fin de l'espion.

Le Roy lui-même arriva afin de l'interroger. Les réponses de Romain étaient vagues, ne visant qu'à protéger sa cité d'origine, son identité, et cette hastane, à qui, bizarrement, il s'était tellement attaché dans cette seconde vie. Négociant leurs salut contre des informations, il ne pouvait que se résoudre à faire confiance à l'évèque Rimbaldi et à la maréchale Arthes.

Dans un dernier geste de générosité, le Roy lui accorda une faveur. Romain, ou quelque fût son vrai nom, demanda qui l'avait trahit. 17 années d'infiltration réussies, des informations pertinentes et importantes relayées, des contacts nombreux dans Citria, tout cela ne lui servirait plus jamais. Sa fin était inévitable, il ne pouvait que s'y résoudre. Seul le nom de son assassin indirect lui importait encore. Et quel ne fût pas sa rage quand le nom du-dit traitre sorti de la bouche du Roy.

- Iyalam

le choc fut terrible. Comment ce vieil homme, ancien Vizir, avait-il pu trahir un Pacha en mission? Il ne pouvait plus que garder sa rage et sa colère en lui, et s'en enivrer les sens, oubliant l'infinie douleur de la torture qui l'attendait avant de quitter le monde des vivants.

Et espérer que sa place au Voriasham lui serait accordée...

Spoiler:

Sujet: Re: Tourments Mar 12 Mai 2009, 7:40 pm

Les premiers jours furent terribles. Son corps combattait la douleur et les blessures du mieux qu'il le pouvait. Rouvertes et refermées à chaque visite par Louen, ses plaies suintaient et saignaient continuellement. Son corps était asséché, ne buvant qu'eau salée et mangeant juste assez de pain moisi que pour être tenu en vie. Il se battait, sachant cependant que cela ne ferait que retarder le moment fatidique. Jamais il ne pourrait s'en sortir. Il avait conscience que cette fois, c'était la fin. Torturé, hurlant de douleur, il n'avait plus de notions du temps. Combien d'heures, de jours avait-il passé cloué au mur, endurant ce calvaire, il ne le savait plus. Il avait déjà tout avoué, tout dit.

Durant son temps de repos, seul, dans le froid de la caverne, il se mit à délirer. Les yeux entrouverts lui renvoyaient la vu du Saint Désert, sa terre natale. L'horizon lointain dansant dans l'air réchauffé par le sable brûlant. L’odeur de la brise sèche mélangée au sel marin se répandant à partir du port dans toute la ville. Le bruit du Souk matinal amorti par le sable mou. Ah, Najar’Him, Sainte Cité, perle du désert, joyaux du Khandraas, palais illuminé à jamais par le Roi-Soleil. Il éprouvait tant d’attachement pour sa ville, et pourtant… Une autre image s’imposa doucement à lui. La ville devenait floue, le désert s’éloignait, la chaleur disparaissait. Et son visage lui apparu. Sybille…

Sa douce moitié, son véritable amour. La seule qui l’avait aimé pour ce qu’il était, et non pour ce qu’on pensait qu’il était. Elle était de glace, le regard le fusillant. Il avait tellement craint sa réaction ce soir là. Il ne lui restait plus qu’elle. Il se savait traqué, comme un animal réfugié dans son terrier sentant la présence oppressante des chasseurs. Il s’était alors résolu à lui parler de vérité, s’offrant nu à elle. Elle avait hésité à le tuer. Elle aurait du. Cela leur aurait épargné tellement de souffrances. Son amour l’avait pardonné, mais elle s’en était effondrée au sol, encore plus abattue qu’auparavant. Il s’était rapproché d’elle, des mots doux pour la réconforter. Mais rien n’y fit. Il était tombé dans le piège qu’il s’était juré de ne jamais défier. Il l’aimait, et elle aimait Romain. Mais Romain pouvait-il encore exister, loin de Citria ? Il espérait que, même sous sa nouvelle apparence, son infirmité lui permettrait de reconnaître le même cœur battant dans sa poitrine. Il lui faudrait du sûrement du temps, beaucoup de temps, peut-être trop de temps.

Un bruit le sorti de sa torpeur. Louen était à nouveau de retour. Cette fois, Romain n’avait plus la force de se jeter la tête contre le mur. Il ne pouvait que se résoudre à attendre, à penser à Sybille, et à espérer que la mort viendrait rapidement le délivrer. Se concentrant sur leurs souvenirs, il se revit partir à la cueillette de fleurs lointaines, parcourir les landes silencieusement, de Lukmaar à Illidewis, d’Hildrim à Sombrum. Ramenant toutes ces choses que Sybille ne pouvait pas voir, mais bien sentir. Leur première fête d’anniversaire à deux, uniquement pour passer un doux moment avec elle. Son expression de surprise quand il lui offrit un fin collier d’or. Collier qu’elle avait porté toutes ces années durant, ne s’en séparant que pour s’enivrer de leurs étreintes. Ils s’étaient assis dans une petite clairière de la forêt, séparés des tracas du monde extérieur. De sa maladresse, Romain s’était approché de Sybille. Elle l’avait guidée, riant doucement de son ignorance avec les femmes. L’un des rares moments où elle s’était totalement libérée. Et de leur premier baisé, il se souviendrait toujours.

Une douleur atroce le ramena face à Louen. Il tourna la tête vers la plaie nouvelle. Son bras gisait à présent au sol. Le sang s’écoulait abondamment. La délivrance finale arriverait bientôt. Mais une lueur bleutée sorti de la main de Louen et cautérisa la plaie. L’écoulement de sang s’arrêta, la douleur s’estompant à peine. Il détourna son regard sur Louen, mélangé entre la colère due au sadisme de l’hospitalier, et la pitié suppliant sa mort prochaine. Hélas, Louen s’en alla une fois de plus, le laissant à nouveau seul avec ses songes.

S’effondrant dans un sommeil second, son esprit le guida vers sa maison. L’un de leurs derniers moments de bonheur intense. Ils avaient enfin pu s’acheter leur petit coin de paradis. Isolés au loin de Citria, le bruit de la mer et une maigre plage toute proche, à l’abri des tempêtes entre deux collines, leur petite maison se dressait fièrement. Le Domaine de Lys. Chez eux, rien qu’à eux, et personne ne pourrait le leur voler.

Sybille lui réapparu. Ses traits étaient concernés et inquiets. Cette fois, point d’image floue ou fixe, mais bien une Sybille entière, s’approchant lentement de lui, accompagnée de Louen. Romain mit quelque temps à se rendre compte qu’il était conscient et éveillé. Une larme perla sur la joue de sa fiancée, suivie d’une autre, et encore. Il tenta de lui sourire, de la rassurer, mais son état parlait de lui-même. Le sang séché mélangé à la poussière de la mine formait une pellicule sale recouvrant tout son épiderme. S’approchant lentement de lui, Sybille en oublia la présence de Louen. Ce dernier se tenait à l’écart, respectant les deux amants. Romain n’irait pas loin de toute façon. Murmurant quelques douces paroles à ses oreilles, Sybille se rendit rapidement compte du calvaire de Romain. Il n’était plus que souffrance et désespoir, maintenu en vie magiquement par Louen. Caressant son visage de ses fins doigts, Romain en eu le cœur serré. Il en avait presque oublié le contact de son aimée, et l’amour qui les unissait. La présence de Sybille à ses coté, une fois de plus, lui ravivait ses sens endoloris, presque éteint. Lui souhaitant courage et espoir, il fallait que Sybille vive, pour lui, et pour leurs enfants.

Reculant de quelques pas, Sybille manqua de faillir, abattue et choquée par la vue de Romain. Mais son amour lui semblait revenu, intact, comme durant ces longues années de vie commune. Sans doute ne reconnaissait-elle plus le traitre, mais de ses yeux faibles, elle ne voyait plus que l’homme qui la chérissait tant. Une lueur perça son regard. Ses mains se resserrèrent, et elle s’approcha à nouveau. Devinant ses pensées, Romain voulu la remercier et la supplier. Qu’elle agisse sans douter, qu’elle le soulage sans faiblir. Agenouillée face au Kheijan, elle l’embrassa doucement. Répondant à son baisé, il senti à peine la lame pénétrant sa poitrine, s’enfonçant droit au cœur. Percé de part en part, ce dernier s’arrêta de battre immédiatement, comme s’il n’attendait qu’une simple raison pour enfin gagner un repos éternel. Dans un dernier souffle, il se souvint de leur promesse mutuelle. Jamais plus ils ne devaient se quitter.

Il tenta alors de rassurer Sybille une dernière fois, lui donnant son amour pour l’éternité.

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Paysan Nbre de messages : 112 Inscription : 18/12/2007

(suite du post de Romain)

Sibylle l’avait poignardée, sous les yeux de Louen, pour le libérer de ce calvaire. Elle aurait du le faire bien avant mais la peur de perdre la seule personne qu’elle avait au monde l’a chavirait. Aujourd’hui, elle comprenait plus que quiconque l’importance que sa lame dans le coeur de son amour. De sa main elle terminait ce qu’elle avait commencé. Le souffle de Romain s'était éteind durant ce lourd baiser que Sibylle porterait sur les épaules le reste de son existence.

Rompre le dernier baiser fut difficile, car c’est maintenant un Romain mort qu’elle allait devoir sentir prêt d’elle. À contre coeur, elle se défit de la molle étreinte, laissant le corps mort de Romain pendre du bout de ses souffrances.

-Je devais le faire Louen...siffla la veuve à l'homme d'église qui allait détâcher les liens du feu prisonnier.

Son regard s'était de nouveau voilé, par choix, peut-être mais l'aveugle avait maintenant retrouver le confort d'être insensible aux vues horribles de sa vie.
Louen lui avait parlé... elle n'aurait pu vraiment savoir ce qu'il lui racontait.. son esprit était ailleurs, loin de citria, loin de Romain.. et surtout loin de cette salle de torture.
C'est une fois au dehors, à l'air froid que ses esprits lui revînt....Elle venait de tuer Romain....sa peine était grande mais la joie de le savoir maintenant en lieu sure l'a consolait.
En silence, elle se diriga vers la fontaine où elle prit place malgré le froid...elle ne le sentait plus vraiment à vrai dire....elle était juste là, maudissant tout ce qu'elle connaissait.

20ans... s'étaient écoulé aux cotés de cet homme qu'elle avait peut-être jamais connu réellement... Mais elle l'aimait d'un amour peu commun..Elle l'aimait parce qu'il avait subsister à tous ses besoins, qu'il l'avait fait sentir belle malgré son handicape, qu'elle était tout pour lui....
Aujourd'hui que restait-il?.. quelques miettes d'histoire que personne ne se souviendrait...des milliers de baisers en une trahison envolés...

Les larmes sur ses joues ne cessaient de couler...elle se vidait de toute les larmes qu'elle n'avait jamais pleurer, de sa vie...Odéon avait mit Romain sur sa route pour la délivrer de ses tourments antérieurs et aujourd'hui il venait le reprendre pour plonger dans un chagrin encore plus profond... L'habitude d'être seule n'était plus, chez Sibylle... La raison de son existence et de sa vie venait de disparaître en même temps que cette dague qu'elle venait, il y a quelques heures , de planter dans la poitrine de son époux.

L'aveugle veuve demeura sur le banc, près de la fontaine, de longues heures.. à pleurer, comme une madonne oubliant la présence des gens et l'inibition de se cacher quand on pleure....Elle était sourde aux questions des passants et de l'outrance de certain de voir une femme pleurer sans retenue, publiquement...

Elle était peu habillée, ses mains tombaient sur le banc, de chaque coté. Défaite, elle tirait un trait sur elle...

- Je n'ai que lui sur cette terre.. pourquoi devrais-je rester?....Vais-je le rejoindre toute suite?...

Cette question l'a rongait...cette question l'a rongait tellement qu'elle avait oublié même le temps et c'est une nuit complète qu'elle passa sur ce même banc où les passants l'avait retrouvé le lendemain à leurs grands désarois.

Ils l'avaient bien retrouvé...certe.. mais gelée sur place, les yeux ouverts, fixant le néant, comme toujours...Le froid l'avait endormie...endormie sur sa question qui l'a rongait...Mais qui finalement avait eu raison d'elle

.......Ce fut la fin de ses tourments.

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Sujet: Re: Tourments Mar 12 Mai 2009, 8:38 pm

Citation :: Je ne peux nier le fait que j'ai adoré vous "suivre" dans vos écrits. La fin est véritablement touchante, surtout imagée en screen. Une petite musique d'ambiance et le tout y est. Vraiment, bravo à vous deux. J'ai particulièrement aimé la "déchéance" des couleurs de ton texte Len, vraiment bien pensé. Une vraie artiste quoi !

Paysan Nbre de messages : 145 Inscription : 11/02/2007

Citation :: Très belle leçon de Roleplay, c'est aussi de la littérature dans ce cas précis. Il est toujours agréable de savoir qu'un simple jeu peut faire passer des sensations au travers de l'écrit comme un livre ouvert.

Au plaisir de vous voir en jeu, en fantômes ou en nouveaux. Et j'espère que la fin de cette histoire ne vous aura pas fait perdre l'envie de jouer.

Paysan Nbre de messages : 112 Inscription : 18/12/2007

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Sujet: Re: Tourments Mer 13 Mai 2009, 12:37 pm

Louen et Romain ne s'étaient toujours connus que comme des adversaires politiques. Autour de tables de discutions, l'un et l'autre s'évertuait à tirer la couverture vers lui-même afin de prouver autant sa supériorité que sa vaillance. Avec les années pourtant, un respect évidant s'était installé entre les deux hommes.

Depuis ces derniers jours, Louen et Romain avaient appris à se connaitre intimement. À travers de longues et douloureuses séances de tortures, Louen faisais cracher au supplicié ce que le Royaume devait connaitre. Ce lien si étroit qui existe entre un bourreau et sa victime ne trouve son pareil nul part. Et Romain avait été condamné à se faire torturer de la sorte tous les jours pour les 30 prochaines années.

Le jour où Sybille se présenta à lui, il ne pu refuser l'unique demande d'une fiancée en pleur. Il permit à icelle d'échanger quelques mots avec Romain afin que des adieux formels soient prononcés. Heureusement pour la suite, heureusement pour les coeurs, Sybille fut preuve de compassion et d'amour, mettant fin au supplice horrible que subissait Romain depuis déjà des semaines.

Louen écrivit dans son rapport au roi : "Justice fut rendue, la fiancée de Romain d'Organo a usé de son droit le plus divin."

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