Une réponse lui parvint.
Mon Père.
Je prends la plume pour vous faire part de mon impression première à la suite de ma lecture de votre pli. Je suis comme vous un être pétri par la franchise, je vous parlerai donc sans feinte.
Je tenais à spécifier que mon honneur fut spolié par l'action, et nisi la parole, d'une tête de notre lumineuse Armée. La rumeur qui vint à vous est peut-être exacte, cependant je ne saurais pas vous mentir, en vous exposant ce qui arriva.
Le sieur d'Argon se fiança à ma personne, il me laissa sans nouvelles trois saisons, s'engagea auprès d'une autre, me fit parvenir un pli pour rompre, sans spécifier les causalités de rupture, ce qui peut laisser supposer que j'aie torts ou tare qui l'aient poussé à me répudier, et ne me prit point la peine de mentionner qu'au passage, il m'eut trompé. Lorsque je lui fis parvenir une missive mandant explication, elle resta sans réponse. J'appris plus tard, auprès de la nouvelle flamme du sieur d'Argon, la vérité qu'il m'avait voilé, qu'il avait refusé de divulgué malgré ma requête. J'honnis l'hypocrisie, mon Père, car c'est là moeurs narshouliennes.
Je suis une personne qui a bien peu d'exigences et requêtes. Cependant je fis promesse au Preux Louen Rimbaldi, défunt Archevêque, que toujours son nom serait pur. Au vu des actes du sieur d'Argon, au su de la réputation qui m'est faite, au vu de la manière dont il s'eut joué de moi, je crois qu'il est légitime que j'en vienne à demander réparation, au nom de cette promesse. Car je ne suis pas du genre à renier mes promesses, à revenir sur mon mot.
Il est des situations, mon bon Père, où la prière est juste, mais n'offre que peu de sens. Je me présente à chaque jours aux messes, au levant et au couchant. Jamais je n'en viens à déroger aux préceptes que l'on m'a inculqué depuis toujours. Et contrairement au vent vil des rumeurs, jamais je n'envisageai le formariage avec celui qui m'a parjuré. C'est donc sans péché que je désire demander réparation. Car je peine à voir mes torts, mon mérite, d'être ainsi bafoué.
Je fus une fiancée fidèle. Je tâchai de toujours offrir ce que j'eus de meilleur au sieur d'Argon, comme j'offre à Citria le meilleur de moi-même. Lorsqu'il disparut mystérieusement, à chaque jour je trouvai le temps de parcourrir les bois à la recherche de l'homme, vif ou mort, priant à chaque pas de le trouver vif et en forme.
Lorsque je revins de pélerinage, ce fut pour prendre connaissance de sa rupture après l'avoir sollicité, l'ayant su de retour au Sein de la Blanche. Sitôt, je recommuniquai avec lui afin de découvrir le pourquoi de la chose. Mon pli fut laissé sans réponse. Je priai chaque jour pour avoir cette réponse. Pour savoir en quoi je fus mauvaise fiancée, mauvaise femme, indigne d'un homme d'hastanie. Ultérieurement je découvris la vérité. Et chaque jour mal me pris. Je voulus de prime abord faire mes voeux de chasteté. Le Sénéchal m'ayant imposé de ne pas déroger à mon devoir malgré cette rupture, en son pli expéditif, je m'étais persuadée d'agir ainsi. L'Archevêque me refusa ces voeux. Je cherche depuis une manière de me laver de cette souillure et sachez mon Père que chaque jour je prie pour la découvrir. Mander le duel n'était pas ma première idée. Cependant cette promesse à laquelle me tient le testament du défunt Archevêque, comme celle que je lui fis de ne jamais laisser notre nom se spolier ou partjurer, m'impose à mander ce duel.
Le mieux pour Citria, serait sans doutes que je le mande par moi-même. Ainsi, au vu de l'expérience martiale su Sénéchal et la mienne, l'issue du duel ne fait pas de doutes. Citria conservera le Sénéchal qu'elle a choisi, où que ces tristes affaires de coeur l'aient mené. Cependant lorsque mon sang abreuvera les terres d'hastanie, mon honneur sera lavé. Je ne peux plus vivre, bon Père, liée de ces deux promesses au défunt Archevêque et porteuse d'une souillure ainsi faite. Plus vivre, à moins qu'il ne soit duellé et vaincu. Ce n'est pas le Sénéchal que je défierai. Mais bien l'homme qui eut menti par omission. L'homme qui eut à mon égard triste hypocrisie.
Les saintetés d'un être n'en lavent pas toutes les tares. Le sieur d'Argon déclâma lui-même ne pas être un saint.
J'aimerais qu'avant de me rencontrer, vous lisiez en entier ce pli, en preniez totale connaissance. Vous pourrez me voir à la messe de l'aurore ou des vêpres.
Bien à vous,
Euryale Rimbaldi Bernay.