[Légende] Les Quatre Cercueils Princiers

Guiraac était un kardar un peu fou. Et pour cause, il inventait toujours tout et n'importe quoi. Parmi les monticules de choses diverses qu'il construisait, seule une était retenue et brevetée par an. Il vivait reclus, à l'extrême limite de la ville de Kar, à l'orée d'un bois petit et dense qui cachait une immense forêt sombre. Sa femme était morte quelques années après avoir donné naissance à sa fille unique : Ivona. Cette dernière était jolie et convoitée, elle ouvrit une petite librairie à Kar et y vécut. De nouveau seul et sombrant dans une vieillesse angoissante, Guiraac décidait d'approcher la perfection en matière d'ingénierie. Chaque jour, sa maison, très mécanique, fumait de part et d'autre et lui en tablier s'affairait en menuiserie et en constructions de divers rouages.

C'était une profusion de machines loufoques, qui ne servaient à rien. Et il désespérait de pouvoir un jour, donner naissance à cette perfection technique. Pourtant, il gagna en notoriété dans Kar. Non seulement par la réputation de sa fille à Kar, que beaucoup de kardars honnêtes et débrouillards convoitaient, mais aussi par le fait qu'il impressionnait par le nombre de ses inventions. Pour certains il était un exemple et quelques unes de ses inventions par le passé, avaient fait grandement fureur chez le peuple kardar. On se rappellera notamment cette machine bruyante qui broyait le minerais fraîchement sorti des mines. Il vivait de ses brevets, riche, s'enfermait dans sa folie et son égoïsme. Bientôt, il ne voulut plus entendre parler de personne, jusqu'à Ivona sa propre fille qu'il avait oublié. Il se morfondait et se laissait dépérir, jusqu'au jour où une délégation hastane arriva à Kar.

C'était un jour de fête, les quatre princes d'Hastanie venaient officiellement participer à la première grande foire de Kar. Emmeric, Arthur, Philippe et Richard étaient tous quatre des descendants directs d'Atlas D'Hastanie, premier Roi. Courageux chevaliers, ils étaient réputés pour leur complémentarité et leur grande solidarité. Nés tous quatre sous une bonne étoile, ils furent à leur naissance accueillis par Harlok, l'entité de la force et de l'endurance, que respectait énormément leur père, le Roi. Pour chacun d'eux, Harlok forgea une épée à la force incroyable. Ainsi, quand le dernier des quatre entra dans l'âge adulte, ils vinrent à Kar pour rendre hommage à Harlok, et sceller les toutes premières alliances avec les kardars. Néanmoins, ils avaient pleinement conscience qu'un trop grand cadeau pouvait être empoisonné. Et si chacun savaient manier son épée avec justice et honnêteté, ils eurent peur que ce ne fut le cas de leur descendant ou que simplement leurs armes tombent entre de mauvaises mains. Si tôt, ils songèrent à un moyen de les tenir éloignées sans pour autant les détruire et manquer de respect à Harlok.

Ils entendirent parler de Guiraac, l'inventeur fou qui insuffla les toutes premières passions pour l'ingénierie au peuple Kardar. Le convoquant dans leur quartiers d'hôte, ils lui demandèrent de construire un coffre-fort où ses épées reposeraient pour l'éternité. Guiraac, accepta le défi qui le sortit de sa morosité et trouva là un défi à sa hauteur. Il demanda aux princes de revenir dans une année complète, avec leurs épées. Scellant ainsi ce contrat par de nombreux serments, ils s'en retournèrent l'esprit serein. Et Guiraac commença le travail. Il passa des jours à traverser la sombre forêt pour arriver à la montagne qu'elle cachait. D'autres jours furent nécessaires pour atteindre la grotte dans laquelle il creuserait son coffre-fort. Et combien en passa-t-il de ses jours à creuser cette roche la plus dure ; car cette grotte était la tanière d'un ancien dragon légendaire, cachée de presque tous, elle était connue de la famille de Guiraac. Au fond de la grotte, il creusa donc une grande crypte qui serait l'intérieur du coffre-fort. Au bout d'un mois, il eut fini la construction de son coffre, mais ce ne fut pas la partie la plus géniale de son travail. Le plus génial était d'en construire la porte. Il passa des mois à construire les rouages assez solides pour faire coulisser roches immortelle et panneau de bois ; sans laisser une seule faille derrière le mécanisme. A l'aube du dernier mois, il fermait le coffre après y avoir apporté quatre cercueils de verres où reposerait une épée.

Il ne restait plus que deux mois avant que les princes ne reviennent à nouveau. Deux mois nécessaires à confectionner la combinaison de ce coffre. Puisque tout ce qui était fermé, se devait de pouvoir s'ouvrir. Guiraac était vieux et fou au point d'être génial, sans famille ni amis, il ne risquait pas de compromettre les projets des princes en se servant des épées. Fidèle de Harlok, il mènerait sa mission à bien. Ainsi il choisit de construire comme clé, des chandeliers. Simples objets banaux, personne n'aurait l'idée de penser qu'ils cacheraient un véritable trésor. Il mit du coeur à l'ouvrage. Il conçut ainsi quatre chandelier à quatre branches de telle manières qu'ils pourraient parfaitement s'imbriquer dans quatre endroits de la grotte reliés au mécanisme d'ouverture du coffre-fort. C'était comme une clé et une serrure. Peu fier, il grava sur chaque chandelier, le nom de chaque prince.

Les princes revinrent à la date prévue et Guiraac les emmena au coffre-fort de la montagne. Muni des quatre chandeliers, il les donna à chacun des princes et leur demanda de se situer à un endroit particuliers de la grotte,non loin du fond, et d'imbriquer les branches dans quelques failles apparentes. Ils le firent et tournèrent. Un bruit de mécanisme cliqueta et avec un grondement sourd, le fond de la grotte se mit à bouger, coulissant doucement, faisant tomber un peu de poussière pour ouvrir l'accès à une petite crypte où attendaient quatre cercueil de verre. Chaque prince, déposa son épée et la seule récompense que demanda Guiraac fut de garder les quatre chandeliers. Les princes acceptèrent, car à lui tout seul il ne pourrait se trouver en quatre endroits différents et actionner le mécanisme en même temps. Dès lors Guiraac jouit d'une grande notoriété et ses inventions donnèrent lieu a des recherches techniques parmi le peuple Kardar.

Mais, Guiraac connut une bien triste fin. Alors qu'il travaillait à des plans sur sa table, dans sa maison recluse vers le bois, un tremblement de terre sévit. les quatre chandeliers qui étaient allumés par des bougies en divers lieux de la pièces, tombèrent, ébranlés et mirent le feu à la maison majoritairement construite en bois et autres matériaux économiques. Surpris, Guiraac, trop vieux, n'eut le réflexe de s'échapper à temps et mourut, dévoré par les flammes impitoyable de ce qui fut son plus grand secret. De la maison, il ne resta que ruines qui cachaient les chandeliers sous les cendres à présents froides de l'oubli.

Jusqu'au jour où un bien curieux individus tomba sur la maison en ruine datant de plusieurs siècles. C'était un vagabond à moitié lépreux qui avait décidé de vivre reclus vers le bois qui cachait la sombre forêt aux extrêmes limites du territoire de Kar. Curieux, il décida de fouiller ses vieux décombres et en sortit comme objets de valeurs que quatre chandeliers en or terni par la suie. Il les garda un temps avec lui, mais ce temps fut propice au pire cauchemar; Chaque nuit passée près de ces chandeliers éveillaient en lui les pires horreurs, et l'âme tourmentée de Guiraac désireuse de garder à jamais le secret des épées reposant, venait l'épouvanter dans son sommeil. Si bien que le vagabond revendit ces quatre objets à des escrocs pour se débarrasser de ce qu'il considérait comme une malédiction.